Cycle de réflexion proposé par
Michaël Lessard et Alicia Mâzouz
Les émotions marquent de leurs empreintes le droit. La norme, l’arrêt et l’analyse peuvent susciter de la colère, de la surprise, du dégoût, de la tristesse, de la joie, de la peur. On commande alors aux juristes de se distancier de leurs émotions pour adopter une rationalité juridique que l’on qualifie d’objective. Cette distance, si elle peut être utile pour assurer un degré de prévisibilité et d’impartialité, empêche toutefois les juristes d’observer ce qui les habite pourtant au quotidien.
Ce projet propose de repenser la place des émotions dans notre relation au droit et plus particulièrement dans le domaine de la recherche et de l’enseignement. La réflexion s’articulera ainsi autour de trois temps forts : la constatation, l’évaluation et la proposition.
Premièrement, les émotions doivent être constatées. Chaque personne participant au projet pourra ainsi tenir un journal de bord des émotions ressenties au travers de la recherche et de l’enseignement. À raison de quelques entrées par semaine, au gré des expériences passées et présentes, ces carnets individuels permettront de dresser un portrait plus large dans le temps des émotions vécues lors de voyages universitaires dans le droit. Cet exercice, en soi, revêt une importance puisqu’il nous permettra de nous reconnecter tant avec notre quotidien qu’avec les émotions qui traversent nos pratiques d’enseignement et de recherche.
Deuxièmement, nous devons évaluer le portrait émotif de nos quotidiens universitaires. La distribution des émotions nous convient-elle ? Certaines émotions seraient-elles à favoriser, d’autres à éliminer ? La réponse diffère-t-elle lorsque nous envisageons le bien-être personnel plutôt qu’un objectif professionnel ? Les réponses varient selon les personnes mais collectiviser la réflexion saura l’enrichir.
Troisièmement, nous devons réfléchir à l'effet de ces émotions sur la méthodologie de la recherche et de l’enseignement juridiques. Sachant que les émotions sont inévitables, nous devons nous demander s’il y a lieu de revoir le mythe de la posture objective que l’on prend dans la recherche et l’enseignement. Les émotions doivent-elles être divulguées, réprimées, modifiées ; et si oui, lesquelles et comment ?
Ce projet crée un espace de discussion où aborder ces questions. Pour ce premier cycle, qui s’étendra sur la fin d’année 2022 et le début de l’année 2023, nous vous proposons de centrer la réflexion autour des six émotions primaires, soit la joie, la tristesse, la peur, la colère, le dégoût et la surprise.
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