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Des-compositions du droit : une exposition pour mettre le droit en peinture

Dernière mise à jour : 5 févr.

Le 11 octobre 2023, Dilara Dadbin, Mariève Lacroix et Alicia Mâzouz accueillaient les visiteurs et les visiteuses à la Galerie d'art d'Ottawa. Cet évènement a permis de révéler au public une nouvelle approche du droit passant par la représentation picturale de concepts juridiques. Le thème choisi portait sur la question de la protection du corps après le décès de la personne. Cette exposition a ainsi permis aux personnes présentes de voyager à travers la question de l'identité, la dignité, la classification des choses et des personnes, la notion de mémoire... Cette expérience sera assurément reproduite dans d'autres lieux mais en attendant vous pouvez découvrir la genèse de ce projet et le plan de l'exposition ainsi que quelques images et les reportages réalisés par Radio Canada dans cet article.

Les autrices de ce projet souhaite remercier le designer graphique Pierre Constantin pour son accompagnement remarquable dans ce projet. Pour découvrir son travail c'est ici.


Genèse et conception du projet

Des rencontres. Montréal 2009, Alicia Mâzouz et Mariève Lacroix sont au doctorat. Elles se passionnent pour la personne, son corps, sa mort. Elles refont un peu le monde, rêvent de projets, s’entêtent, ne se quittent plus. La mort et le droit, cela les rend vivantes. Genève 2022, lors d’un séminaire de l’OUdropo,,, Dilara Dadbin, juriste-artiste, offre au regard une œuvre représentant le syllogisme juridique. Alicia boit ses paroles, admire ses images, est fascinée par son esprit. Mariève doit la rencontrer ! Quelques jours plus tard, dans un espace dématérialisé, une rencontre triangulaire s’opère et un projet naît. Du hasard il a fallu, de l’audace un peu aussi, mais surtout, une passion commune pour le droit et ses représentations. En travaillant sur ce projet, Dilara a offert de nouveaux horizons aux pensées, a renouvelé les raisonnements et les formulations, a mis de la couleur sur les mots du droit et du désordre si salutaire dans ce qui devenait un peu trop établi. La mort en droit n’est pas une mer tranquille, cette exposition vous le prouvera.


C’est cette collaboration que nous vous offrons aujourd’hui. En toute simplicité, fascinées que nous sommes par les échanges qu’elle pourrait induire, encore, prolonger les discussions avec de nouvelles personnes. Nous ne voulons pas d’un cercle restreint. Les formes ici sont ouvertes, généreuses, elles vous appellent.


Dilara Dadbin a été sollicitée pour réfléchir à une exposition qui explore la question de la mort, du corps, de la catégorisation et de ses significations d'un point de vue juridique et artistique. Elle a puisé son inspiration dans la doctrine en droit canadien et français, dans les textes de lois, dans les décisions de justice. Le droit, sous toutes ses formes, est la source motrice de son inspiration et de ses créations. Sa démarche est singulière car étant juriste elle comprend le langage du droit et parce qu’elle est aussi artiste elle peut se nourrir de toutes ces sources pour créer. Cette exposition est donc celle d’une juriste-artiste.


Ce qui est proposé ici est un laboratoire d'expérimentation. Nous interrogeons le droit par le biais de l'image qu’il permet de créer. En produisant des images, il est encore et toujours permis de mieux penser le droit. L'art, riche de sa composante émotionnelle, mais aussi de sa capacité de représentation et de ses multiples lectures, agit comme un catalyseur et constitue l'un des meilleurs vecteurs pour visualiser des idées difficiles à transmettre. La pensée de Picasso, lorsqu’il affirme “on ne copie jamais la nature, on ne l’imite pas davantage, on laisse des objets imaginés revêtir des apparences réelles”, trouve ici un écho certain. En droit, on ne copie jamais la nature, on l'imite, on la qualifie. Mais cette fois, on laisse les apparences réelles revêtir des aspects imaginaires. Ainsi, la personne humaine, bien réelle, est appréhendée en droit par le concept de personnalité juridique.

Cette exposition est une interprétation visuelle de la construction du droit à partir de différents textes, une nouvelle référence, une nouvelle ouverture. C'est une exposition itinérante qui sera appelée à se déplacer d'un pays à l'autre et à l'intérieur d'elle-même, évoluant et se complétant au fur et à mesure des interactions avec la communauté qui la visite. Comme les porteuses de ce projet, il s’agit d’une exposition marquée par sa diversité culturelle et son ouverture sur l’autre.





Un parcours d'exposition sous forme d'une dissertation : découvrez l'introduction et le plan



NOTRE EXISTENCE N’EST QUE LA BRÈVE LUMIÈRE D’UNE FENTE ENTRE DEUX ÉTERNITÉS DE TÉNÈBRES.

Vladimir Nabokov


Dès notre naissance, nous acquérons une personnalité juridique, qui est une création du système juridique visant à nous donner la capacité de “participer à la vie juridique”. Le premier cri de l'humain - être vivant et viable - devient le premier cri de la personne juridique.

Grâce à notre personnalité juridique, en tant que personnes vivantes, nous sommes considérées comme des sujets de droit. En d'autres termes, nous pouvons exprimer notre volonté en signant un contrat, en décidant de nous marier ou d'accepter un nouvel emploi.

Et toutes les autres "choses" sont considérées comme des “objets de droit”, sur lequel les sujets peuvent exercer des pouvoirs.


Dans notre système juridique, nous faisons une distinction essentielle entre les personnes et les choses.


Les êtres humains possédant une personnalité juridique sont classés dans la catégorie des personnes. Il s’agit d’une catégorie fermée, dans laquelle il n’est possible d’entrer que sur la pointe des pieds. L’être humain y est invité et, par anthropomorphisme, la personne morale autorisée. À l’extérieur de cette catégorie existent les choses voire les biens.


La mort entraîne la disparition de la personnalité juridique et, avec elle, une certaine protection de l’être qui a été mais qui n’est plus. Notre corps devient-il alors une chose ordinaire ou s'accroche-t-il encore à la catégorie des personnes ? Cette binarité, tant de fois éprouvée par des travaux de recherche variés, offre un terrain de prédilection à la réflexion dans le cadre de cette exposition.


Finalement, quelle est la place du corps humain dans cette classification une fois que la personne juridique a disparu?


Pour répondre à cette problématique, l'exposition a été organisée sous la forme d'un plan de dissertation :






I) Qualifier le visible

A ) La portée de la qualification juridique

B) Les traits significatifs caractérisant les êtres humains


II) Faire émerger l’invisible

A) La nature de ce que la personne laisse derrière elle

B) L’émergence de nouvelles catégories dans l’univers juridique






Les reportages réalisés en direct par RADIO CANADA




L'exposition organisée le 11 octobre 2023 à la Galerie d'art d'Ottawa constitue la première présentation de ce projet. Il a toutefois une vocation à se déplacer dans d'autres villes et d'autres pays.


Si vous n'avez pas eu la possibilité de voir ce projet et que vous souhaitez mieux comprendre notre démarche voici deux documentaires réalisés par RADIO CANADA.







Le premier est sous forme audio et assez complet. Vous le trouverez à cette adresse.


Le second permet d'observer quelques images de l'exposition et constitue une bonne synthèse de la démarche :



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