Une scène qui nous saisit, un évènement réel qui se déroule devant nos yeux et voilà que la réflexion se libère. À partir d'un scénario donné par l'enseignant et l'enseignante ou tout simplement de mots-clefs ou de notions, les étudiants et étudiantes incarnent le cas pratique, lui donnant un nouveau souffle.
Le cas pratique est un exercice incontournable à l'université. Et si on le laissait sortir du papier un instant ? Il deviendrait vivant, s'offrirait au regard de la communauté apprenante, qui, captée par la mise en scène, abandonnerait ses écrans.
Objectifs : capter l'attention et mettre au travail en faisant vivre le cas pratique
J'ai crée cet exercice il y a quelques années avec un petit groupe d'étudiants et d'étudiantes qui n'étaient pas juristes et qui avaient beaucoup de difficultés à se concentrer pour lire.
Pour les apprenants et apprenantes composant le public, cette modalité de mise en scène du cas pratique permet de capter l'attention dès le début de la séance, de créer une rupture à tout moment d'un cours ou en transition d'un thème à l'autre.
On essaye ?
Préparation préalable pour l'enseignement : rédiger un bref scénario ou donner des mots clefs
Construire un scénario
La mise en scène peut en quelque sorte être assimilée à une forme de cas pratique joué. Un scénario est confié aux étudiants et étudiantes volontaires en amont du cours. Ils et elles vont ainsi pouvoir préparer pour la séance suivante une scène à jouer, scène contrainte par les éléments du scénario.
Il s'agit, dans le cadre de cette préparation, de saisir dans la scène jouée les éléments de faits essentiels qu'il faudra ensuite qualifier juridiquement.
En donnant un scénario, on oriente le jeu et la présentation. On permet d'insister sur certains éléments.
Exemple de scénario que j'ai pu fournir à des étudiants dans un cours de droit du travail il y a quelques années
Séance n°2. La formation du contrat de travail
Mise en scène n°1
Contexte
L’action intervient dans une boutique. Accrochée à l’entrée, une petite annonce est ainsi rédigée : « Nous recherchons actuellement un vendeur avec des compétences dans le domaine de la chaussure ».
Le gérant de la boutique est présent quand une personne se présente indiquant qu’elle recherche un emploi. Cette personne lui remet un CV sur lequel figure ses derniers emplois. Elle se prévaut d’une expérience de plus de deux années dans la vente de chaussures. A l’issu d’une conversation de 10 minutes, le ou la gérant-e se montre enthousiaste. Il indique qu’il est prêt à recruter la personne.
Cependant, deux jours plus tard, le ou la gérant-e appelle le ou la candidat-e et lui précise qu’une autre personne a été retenue. La personne qui recherche un emploi est furieuse et affirme que le contrat était formé car le ou la gérant-e s’était engagé-e à l’embaucher.
Personnages à jouer :
· Le gérant de la boutique
· La personne qui cherche un emploi.
Donner uniquement des notions ou des mots-clefs
Cette variante est également très intéressante car dans ce cas l'enseignant ou l'enseignante oriente moins les choix. La présentation factuelle jouée devient ainsi un petit défi pour l'enseignant qui va la découvrir en même temps que la communauté étudiante.
Les personnes qui préparent la scène se retrouvent dans la posture du cas pratique inversé : il faut créer la situation factuelle en partant de problématiques juridiques.
Prenons une séance sur la phase précontractuelle. Un groupe devra jouer une situation appelant à la qualification du pacte de préférence, un autre à la promesse synallagmatique, un autre la promesse unilatérale ou encore à des pourparlers. Les autres groupes ignorent les différentes thématiques et leur répartition.
Ce qui est intéressant, c'est de voir que les apprenants et apprenantes peuvent improviser des éléments de faits qui vont avoir un impact sur la qualification finale et en tant qu'enseignant ou enseignante, vous pourrez alors soulever toute l'importance de ce qu'on peut parfois, en apprenant, envisager comme un petit détail.
Mais en droit, le diable est dans les détails !
Jouer la scène pour faire vivre le cas pratique en tout lieux : en présence ou à distance, en synchrone ou asynchrone
Plutôt que de lire un cas pratique, cet exercice permet en quelque sorte de le vivre.
Il faut être concentré sur l'instant et sur le jeu. Le cas pratique ne pourra être relu car il n'est vécu qu'un bref moment. L'exercice permet ainsi de mobiliser une grande concentration.
J'ai pratiqué et je pratique cet exercice en présentiel mais j'ai eu également l'opportunité de le faire en distantiel avec ZOOM. Ce fut d'ailleurs l'un de mes réjouissants moments pédagogiques durant le COVID.
Les étudiants et étudiantes placés en sous-groupes avaient préparé les scénarios. Une fois revenu tous ensemble, chaque groupe a pu jouer sa scène, malgré la distance et se fut vraiment très réussi et instructif. Nous avions utilisé cet exercice à la fin d'une journée de cours en Master 1 qui avait duré 6h et nous avions consacré la dernier heure à cet exercice qui constitua une bonne synthèse et révision des thématiques abordées pendant la journée.
Une version asynchrone peut également être envisagée. Ainsi, on pourrait tout à fait demander aux étudiants de filmer la scène et partager la vidéo dans un espace commun de travail pour que les autres étudiants réfléchissent à la problématique ou il pourrait encore s'agir d'une modalité d'évaluation
Le +
Je trouve que cet exercice permet une vraie concentration des étudiants et des étudiantes. La présentation étant courte, ils ne décrochent pas, d'autant qu'il s'agit d'observer d'autres étudiants et étudiantes. Cet exercice peut également favoriser une forme de créativité et permet de libérer la parole et les personnes dans un groupe. Il offre une vision du droit assurément moins austère que la lecture d'un cas pratique papier ce qui peut être particulièrement utile avec des personnes non juristes de formation.
Le -
Pas de remarque négative pour l'heure. Si l'exercice est bien encadré, je trouve qu'il fonctionne. Il peut s'organiser sur un temps très court et être mené sur des petits groupes comme sur des grands effectifs (sous la seule réserve de la sonorisation). La seule réserve c'est peut-être de trouver des volontaires mais je n'ai pas rencontré de difficulté particulière sur ce point jusqu'à présent.
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