Le Distanciel nous aura appris une chose : il y a d’autre approches de ce savoir que nous, enseignants, cherchons à transmettre aux étudiants. Mais il est parfois difficile de se lancer dans de nouvelles formes de transmission, surtout si celles-ci sont subies et non choisies. Cet article propose quelques pistes et outils pour faciliter les cours en distanciel, que ce soit pour les enseignants comme les étudiants. Pour faire de la contrainte une force nouvelle.
Nuage de mots générés à partir des retours formulés par les enseignants lors de l'atelier pédagogiquement vôtre du 27 novembre 2020
Ce billet est proposé par Sophie Bernhardt, professeure de français, référente pédagogique, spécialisée dans les troubles de l'apprentissage.
UN AUTRE LIEN PÉDAGOGIQUE : BRISER LA GLACE
Se présenter et présenter l’enseignement
Afin de créer un lien pédagogique, présentez-vous comme une personne. L’explication peut être indifféremment audio ou vidéo. Montrer son visage ou entendre une voix humaine ont le même impact. Ne vous sentez donc pas obligé(e) de vous exposer si vous n’en ressentez pas le besoin
Cette présentation formelle, vidéo ou sous forme de Powerpoint audio, sera l’occasion de formuler les modalités de votre cours :
- les objectifs,
- les formes d’évaluations envisagées et le calendrier des attentes,
- le temps à y consacrer en dehors des visios,
- les ressources utilisables,
- les contenus,
- l’environnement numérique que vous allez utiliser,
- les moyens de communiquer : fréquence des mails et vos réponses (24/48 heures, 1 fois par semaine), visio spécifique pour répondre aux questions, rendez-vous téléphoniques, points d’étape …
L’explicitation des choix pédagogiques sécurisera les étudiants. De plus, en parlant de vous par l’intermédiaire de vos centres d’intérêt ou de votre parcours, les étudiants pourront s’identifier et seront plus réguliers dans leur présence et leur travail.
Quelques idées d’activités brise-glace
Dès votre premier cours, vous pouvez proposer des activités brise-glace qui serviront à créer un « groupe classe », cassant la dynamique de la relation duale pour l’étudiant. En effet, celui-ci ne voit que vous ou votre projection, et oublie parfois qu’il est dans un groupe, au même titre ou presque, que dans un amphithéâtre. Ces activités sont simples.
En début de session, vous pouvez demander aux étudiants de choisir 3 mots ou une image ou un animal qui les représenteraient eux ou une notion de votre cours à illustrer. Ce choix a deux fonctions : d’abord, cela peut devenir leur avatar visio, permettant d’éviter les écrans noirs.
De plus, c’est un moyen ludique de s’impliquer et de se valoriser. Les étudiants devront ainsi donner une image d’eux valorisante et juste. Ils réfléchiront ainsi aux qualités qu’ils veulent mettre en avant et qui seront utiles pour le cours. C’est également un moyen de se présenter aux autres étudiants. On ne donne pas la même image de soi si on choisit un lion ou un rat et pourtant, Jean de La Fontaine montre bien qu’ils sont complémentaires.
Ces différents outils de mise en relation transformeront le cours en temps d’échange où les étudiants se sentiront impliqués et auront les clefs pour réussir.
PENDANT LE COURS : ALIMENTER LA MOTIVATION
Le cours en visioconférence peut devenir un tunnel où le professeur avance avec pour seul écho sa voix ou le bruit de la vaisselle de l’étudiant qui aura oublié de couper son micro.
Afin de transformer le cours en temps partagé avec les étudiants, vous pouvez mettre en place différents moments d’interaction pédagogique. Ainsi, vous pouvez :
- poser des questions inopinées aux étudiants et attendre leurs réponses (sans avoir peur du silence, nous l’oublions trop souvent ce silence à distance ! ),
- proposer un temps défini de questions-réponses pendant votre cours (tchat ou direct) et renvoyer les questions aux étudiants pour qu’ils reformulent, testent leur compréhension et travaillent ensemble.
- demander une synthèse sur un point par un volontaire – un défi valorisant
- proposer des sondages interactifs (www.quizzoodle.com)
En TD ou dans des groupes à effectif réduit, vous pouvez également :
- créer des groupes de travail dans un temps limité, pendant la visio, pour qu’ils répondent ensemble à une question, sous forme de webinaire (voir selon votre plateforme) et que chaque groupe restitue sa production,
- fournir un support en cours de visio via le tchat où les étudiants doivent chercher des informations.
Vous pouvez également découper votre cours en plusieurs étapes, énoncées en début de visio.
Il ne faut pas oublier également de faire de vraies pauses de quelques minutes pour se lever et faire une « pause cerveau », relançant l’attention de chacun, dont la vôtre ( sans oublier de couper son micro...)
L’ERGONOMIE COGNITIVE : RENDRE SES COURS ATTRACTIFS
Dans le distanciel, le support visuel est capital. Vous pouvez choisir d’être dans un amphi ou un bureau et de reproduire une conférence comme en présentiel ou bien de faire une présentation powerpoint, c’est le principe de la liberté pédagogique. Néanmoins, afin de rendre ces moments les plus adaptés au distanciel, quelques règles sont à suivre :
La contiguïté plutôt que la redondance
En présentiel, on peut projeter un document qui reprend ce qu’on dit (citations, définitions, …) pour que les élèves prennent des notes. Néanmoins, en distanciel, cette répétition à l’identique crée un conflit cognitif. Le cerveau ne sait plus par quel canal traiter l’information et cela épuise l’interlocuteur. Quand vous choisissez des illustrations ou des schémas, vous pouvez superposer une voix off, ou votre explication mais pas de texte, qui créerait une surcharge visuelle. Essayez de vous en tenir à 30 mots par slide, quitte à les multiplier. Ces slides peuvent ressembler à des constructions où les informations s’ajoutent au fur et à mesure, comme une carte mentale (www.mindmeister.com) ou incorporer des pictogrammes (www.thenounproject.com).
Le sens de chaque élément
Évitez les informations inutiles à traiter et créez une signalisation claire et identifiable. Ainsi, les élèves avancent grâce à des marqueurs construits qui facilitent leur compréhension (les silences, les codes couleurs, un sommaire).
La durée de chaque vidéo doit être raisonnable
Chez eux, les étudiants calculent le temps à consacrer à chaque ressource et il est plus facile d’accorder 3x10 minutes à un cours que 1X30 minutes. (montage facile : www.clipchamp.com) Si vous enregistrez votre cours et que vous le rendez disponible, tâchez de chapitrer vos interventions et de les renommer pour que l’étudiant puisse consulter à nouveau ce qui l’intéresse.
La ressource proposée précède une activité
Les ressources proposées doivent être ancrées dans les apprentissages et non pas être présentées comme un supplément du cours. Elles pourraient alors être jugées comme optionnelles. L’activité peut être une reformulation, un quizz dont vous pourrez exporter les réponses, (https://outilstice.com/2018/03/5-outils-en-ligne-pour-creer-un-quiz/), un résumé, un travail de groupe,…
L’ÉTUDIANT DANS CE DISPOSITIF : UN ACTEUR ET NON UN SUJET
En distanciel, les exigences de la vie passent avant un cours. L’important est que l’étudiant ait la sensation que sa présence fait la différence. En amphi ou en TD, il se sent remarquable, mais cela disparaît quand on est derrière un écran. Aussi, faites-lui sentir qu’il est important.
Par exemple, vous pouvez :
- féliciter chaque élève qui aura fait la démarche de prendre contact avec vous ;
- contacter ou signaler à l’administration un étudiant dont vous êtes sans nouvelle ou qui ne s’est pas connecté depuis longtemps ;
- rappeler aux étudiants ce qu’ils doivent faire à la fin du cours et le temps moyen à y consacrer ;
- marquer la fin de chaque étape (définie par vous lors de votre présentation de départ) pour que l'étudiant sente la progression de son travail et la pertinence de sa régularité (sous forme d’auto-évaluation ou de to-do liste à cocher) ;
- demander la rédaction d’un journal de bord dans lequel les étudiants écrivent leur processus de travail, leur faisant réaliser leur avancée. Ils peuvent vous le partager ou le partager sur une plateforme, l’important étant qu’ils aient une réflexion sur leurs apprentissages davantage que de vous démontrer qu’ils travaillent bien ;
- inciter les élèves à travailler en groupe sur des questions posées et qu’ils se posent ensuite des questions les uns aux autres sur le travail réalisé.
Le distanciel est une épreuve pédagogique pour tous les acteurs. Les conseils qui précèdent sont à mettre en perspective d’un changement de paradigme dans notre manière d’enseigner.
Même si cela demande un travail d’adaptation, les contenus interactifs, les présentations et les enregistrements de vos cours pourront, pour partie, être réutilisables. Ainsi, par exemple, les questions et réponses des échanges avec les étudiants peuvent alimenter une FAQ pour les étudiants. La trame d’un Powerpoint peut servir pendant plusieurs années en étant simplement améliorée ou actualisée d’une année sur l’autre. De même pour les tests programmés pour lesquels les questions peuvent être réutilisées.
Notre capacité d’adaptation est mise à l’épreuve. Mais voyons ce temps comme une opportunité afin de repenser encore notre pédagogie dont la limite est notre imagination.
Pour aller plus loin et consulter la présentation proposée par Sophie lors de l'atelier pédagogiquement vôtre du 27 novembre 2020 qu'elle met à la disposition de tous et toutes, c'est par ici :
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